That is THE question… Petite réflexion sur l’avenir de Kahobas depuis Baume les Messieurs (en photo ci-dessus).
C’est depuis la boutique d’artisans de Baume que je prends enfin le temps de rédiger ce nouvel article. Je voulais ce blog un peu plus fourni mais me voilà dépassée par le travail à l’atelier et surtout un peu déconnectée car je n’y ai pas encore internet. Oui mais voilà qu’aujourd’hui, le besoin de vous parler de l’avenir de Kahobas se fait pressant. Et comme j'assure la perm à Baume, me voilà bien obligée de me poser, ça fait pas de mal parfois! Alors je vous livre ces quelques lignes en guise de vraie réponse à cette vraie question que vous êtes si nombreux à me poser, souvent avec bienveillance et plus rarement par pure curiosité disons...mal placée.
Non, Kahobas ne me fait pas vivre ! 70 heures par semaine et à peine l’équivalent d’un RSA, quel taux horaire bien modeste ! Mais oui je suis heureuse et pleine d’entrain tous les jours lorsque je me rends dans mon atelier partagé. Alors yallah ; je poursuis l’aventure ! Fatiguée, mais fière et déterminée car je sais que la route de l’ARTISANAT est sinueuse, longue et que je vais y arriver, à en vivre un jour ! Pour tout vous dire, les commandes et les ventes vont bon train (1000 mercis à vous tous qui me passez commande) mais voilà que deux problèmes se posent : des bénéfices proches de 0 et une capacité de production limitée car l’artisanat c’est du temps et le temps c’est incompressible ou presque !
Alors comment faire ? Je partage avec vous les pistes sur lesquelles je travaille depuis quelques semaines afin de parvenir à me dégager un salaire, en espérant que vous en comprendrez les tenants et aboutissants.
Raisonner en collection et fabriquer en petite série afin de constituer du stock. Fatiguant d’être en flux tendu et surtout très très prenant! Je dois cadrer les créations que je propose et créer une collection afin de fabriquer en petite série et disposer de stock, et donc optimiser mon temps au lieu de faire du "un par un" ! Je gagnerai aussi en réactivité face aux boutiques qui me revendent et que je fais trop longtemps patienter à mon goût ! Fini le temps du carpe diem dans mon stock, je suis trop fatiguée ! Colin va donc venir m’aider pour couper le tissu 3 jours par mois et va surtout aménager mon atelier et m’outiller pour fluidifier mes petites méthodes de fabrication !
Rémunérer le sur-mesure à sa juste valeur. C’est aujourd’hui une option gratuite que je vous propose : comme je le viens de le dire je n’ai pas de stock donc ça ne change rien pour moi d’imprimer vos commandes personnalisées. Mais mon objectif étant de fabriquer en petite série la prochaine collection automne-hiver (qui devrait arriver fin septembre), mon temps dédié aux pièces uniques sera bien plus précieux et je devrai le valoriser ! Rassurez-vous la collection proposera une multitude de modèles/motifs/couleurs donc vous devriez trouver votre bonheur ! Si tel n’est pas le cas, l’option « impression sur mesure » engendrera un surcoût de 4,50€.
Baisser mes coûts de production et mes charges. Nécessitant des matières premières en grande quantité, le temps est venu de négocier des prix dégressifs et professionnels pour baisser les côuts de revient de mon artisanat. Oui, mais il faut que la trésorerie suive et c’est clairement pas facile aujourd’hui alors on fait ce qu’on peut ! Concernant les charges, vous me direz à juste titre que j'ai à présent un loyer + charges à payer alors qu'avant je bossais à la maison. Alors pour compenser, nous avons déplacer notre lieu de vie à 1,5 km de l'atelier et c'est désormais à pieds ou en vélo que je me déplace. Au revoir fatigue et pompe essence/fric!
Supprimer la livraison gratuite : c’est chose faite depuis quelques semaines et j’ai reçu vos avis mécontents à ce propos ! En effet, si c’est pas vous qui payez la livraison, c’est moi ! Et comme je n’envoie pas assez de colis car je ne m’appelle pas Amazon, je ne peux bénéficier de prix dégressifs à La Poste. Ma marge étant très faible, la livraison gratuite est certainement l’un des facteurs responsables de mes bénéfices si minables ! Alors stop à la livraison gratuite, je choisis plutôt de vous l’offrir à partir de 69€ d’achat. Je réfléchis en parallèle à passer par un autre opérateur de livraison car fatiguée des commandes qui mettent 3 semaines à arriver à destination ou bien des colis détériorés que ni le client ni moi-même ne recevons (avec 0 dédommagement bien sûr…).
Augmenter mes prix raisonnablement pour une rémunération plus équitable et ne pas chercher à s’aligner sur les mastodontes de la mode et de la déco (vous savez, l’artisanal qui rime si bien avec Portugal). En effet, mon taux horaire ne peut pas rivaliser avec ceux des travailleurs exploités dans le textile, alors j'ai réévalué mon taux horaire à sa juste valeur. L’artisanal doit aussi rimer avec local et ne doit pas se brader et j’ai eu un peu trop tendance à comparer mes prix à ces géants omniprésents dans les magazines !
Augmenter mes prix aussi parce que je ne peux pas vendre mes produits seules et qu’il faut de nouvelles vitrines pour aider Kahobas à grandir ! Ce qui m’amène à être en quête de bons plans distribution. Vive le circuit court! Les boutiques partagées qui demandent un peu de temps et peu de commissions sont des solutions idéales, c’est pourquoi je me suis engagée à Baume les Messieurs avec 6 autres camarades artisans et avec La Petite Manufacture à Besancon. Mais je dois aussi disposer de temps pour fabriquer à l'atelier, c'est pourquoi je recherche des boutiques prêtes à revendre Kahobas! Consciente que j'ai besoin d'elles pour vivre et vice-versa, il faut donc équilibrer ses prix de vente et laisser une place pour chaque maillon de la chaîne. Rémunérer l’artisan et le revendeur à leur juste valeur, tout un programme ! Et pour ça, je galère car je tiens à ce que mes prix ne s’envolent pas et à être accessible.
Mélanger tous ces ingrédients et laisser mijoter quelques mois, le temps que s’écrase mon golden parachute que sont mes allocations chômage… A mon sens, je devrais pouvoir gagner un peu plus d’argent : le nécessaire pour être sereine face à l’épuisement de mes droits chômage et être toujours aussi créative et énergique au quotidien.
Voilà, c’est la réponse que j’ai envie de faire à vous qui qui me posez si souvent cette question ou qui n’osez le faire. Impossible à formuler en 5 minutes, j’ai eu ce soir une pulsion de transparence que je voulais partager avec vous, histoire de vous embarquer dans cette aventure qui est la nôtre depuis presque 2 ans et pour laquelle nous nous efforçons Colin et moi de tenir la barre vers le bon cap : celui de vivre de l’artisanat.
La balle est dans votre camp. N’hésitez pas à me faire part de vos remarques, de vos bons plans « revendeurs » ou votre coup de gueule sur cet article !